Traitement médiatique de l'inflation : «Il y aurait bien des profiteurs de crise !»
Chaque jour, Bruno Donnet regarde la télévision, écoute la radio et scrute les journaux ainsi que les réseaux sociaux pour livrer ses téléscopages. Ce vendredi, il s'intéresse à l'inflation et à son traitement médiatique.
Retrouvez "Télescopages, Bruno Donnet décrypte l'actualité vue par les médias" sur : http://www.europe1.fr/emissions/telescopages
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00:00 Mais d'abord c'est l'heure des télescopages avec Bruno Donnet. Bonjour Bruno.
00:03 Bonjour Philippe.
00:04 Tous les jours Bruno, vous interrogez ici la logique médiatique et ce matin, vous avez
00:08 choisi de vous intéresser à la manière dont l'inflation a été traitée cette semaine
00:12 car vous y avez un peu perdu votre latent.
00:15 Oui, ça n'a pas pu vous échapper Philippe, il y a eu cette semaine une augmentation colossale
00:19 du nombre de sujets consacrés à la flambée des prix.
00:21 Plus 13% en un an pour les passes, plus 15% pour la charcuterie, 12% pour les chiffres.
00:28 Pourquoi ? Eh bien parce que les industriels et la grande distribution étaient en pleine
00:32 négociation commerciale.
00:36 Les journalistes ont donc suivi la partie de très très près et ils nous ont régalé
00:40 de leurs reportages façon autopsie de la crise.
00:43 Seule certitude, ça va faire mal.
00:45 Alors une augmentation de sujets consacrés à l'inflation.
00:48 Nous avons les olives qui ont pris 12%.
00:51 Jusqu'ici c'était logique.
00:52 Mais c'est ensuite que ça s'est un peu compliqué pour l'amateur de logique que
00:57 je suis.
00:58 Car les journalistes se sont posé deux grandes questions.
01:00 Pour la première, la réponse n'était pas d'un très haut niveau de difficulté.
01:04 Qui paiera la note de l'inflation ?
01:06 Qui paiera l'inflation ? C'est facile, c'est nous.
01:09 Puisque je rappelle que le cours de la banane mais également du pigeon n'a jamais cessé
01:13 d'augmenter.
01:14 Non, la vraie question coton, c'était celle-ci.
01:17 Alors à qui profite la hausse des prix ?
01:19 A qui profite l'inflation ?
01:22 Y a-t-il des profiteurs de crise ?
01:26 Si il y en avait, ce serait un problème politique.
01:28 Voilà pourquoi depuis le salon de l'agriculture, Emmanuel Macron a pris le taureau par les
01:32 cornes.
01:33 Mais là on a besoin d'un effort collectif, d'un engagement.
01:35 C'est ça ce que je demande aussi à nos distributeurs aujourd'hui.
01:37 Il a demandé un effort à la grande distribution.
01:40 Message repris illico par Bruno Le Maire qui en a profité pour commettre une sorte de
01:45 déni sémantique tout à fait remarquable que je vous laisse apprécier.
01:48 Je présenterai dans quelques jours des mesures qui permettront, avec le soutien des distributeurs
01:54 qui doivent faire comme le président de la République l'a rappelé, un effort sur
01:58 leur marge pour continuer à baisser les prix alimentaires.
02:01 Voilà, il a réclamé un effort pour continuer à faire baisser les prix alors que les prix
02:06 n'ont précisément jamais cessé d'augmenter.
02:08 Bien.
02:09 Mais vous l'avez entendu, le gouvernement a donc choisi de refiler la patate chaude
02:13 à la grande distribution.
02:14 Et des problèmes de patates, on en a eu toute la semaine.
02:16 Lundi, des patates.
02:18 Mardi, des patates.
02:21 Mercredi, des patates aussi.
02:23 Mercredi, le PDG de System U, Dominique Schellcher, était sur le plateau de France 5 et il l'a
02:28 dit très clairement, les profiteurs, ce ne sont pas les distributeurs.
02:31 Il y a un certain nombre de matières premières depuis quelques mois, là vous affichez des
02:35 hausses, mais il y a des matières premières depuis plusieurs mois qui sont à la baisse.
02:38 Et curieusement dans ces négociations commerciales, elles ne sont pas répercutées.
02:41 Mais non, personne ne nous parle de baisse.
02:44 Et oui, la grande distribution a refilé la patate chaude aux industriels.
02:49 Problème, les industriels n'en ont pas voulu non plus.
02:52 Alors, ils l'ont collé dans les pâtes des producteurs.
02:55 Le porte-parole du groupe Lactalis qui vend des yaourts l'a d'ailleurs dit, on ne peut
02:59 plus distinctement au micro des RMC.
03:01 Aujourd'hui, ce que nous demandons est plus élevé que les années précédentes parce
03:05 que nous voulons répercuter dans nos prix les augmentations du prix du lait.
03:08 Plus 25% pour les éleveurs, c'est un engagement de Lactalis.
03:11 On a dit qu'on soutenait l'élevage, on a payé 25% de plus le prix du lait.
03:15 Et oui, hop là, si c'est plus cher, c'est pour mieux rémunérer les agriculteurs.
03:21 Ce gars a juste oublié de nous expliquer que les agriculteurs aussi payaient l'énergie
03:25 plus cher et qu'ils avaient pris la sécheresse en pleine poire.
03:28 Mais bon, vous l'avez compris, Philippe, la réponse à la question à qui incombe
03:32 la responsabilité de l'inflation, elle était finalement toute simple.
03:36 La faute à personne.
03:37 C'est la faute à personne.
03:39 Alors bien sûr, on aurait pu se contenter de cette analyse de haut vol.
03:42 Toutefois, j'ai bien aimé l'explication que l'éditorialiste économique de France
03:45 Inter, Dominique Seux, a livrée mercredi.
03:47 Il a eu une sorte de réinterprétation du fameux ruissellement.
03:51 Au fil du temps, la source de l'inflation se transforme en fleuve et des passagers clandestins
03:56 montent dans le bateau.
03:57 Ils en profitent ni vu ni connu.
03:59 Et voilà, ni vu ni connu.
04:01 De l'aube à l'aube, il y aurait bien en ce moment des profiteurs de crise.
04:08 C'est la loi du marché, Philippe.
04:10 Si tu avances quand je recule, comment veux-tu, comment veux-tu que je spécule ?
04:15 Que je spécule, a dit Bruno Donnet.
04:18 Il maîtrise son langage.
04:19 C'est la maîtrise de l'antenne.
04:20 Merci beaucoup Bruno Donnet.